Dans une décision LUPA en date du 4 novembre 2020[1], la Cour de Cassation précise les conséquences d’un dépôt tardif de la déclaration n° 2746 s’agissant de la taxe annuelle de 3% sur les immeubles en cas de « récidive » (« Taxe de 3% »). La sanction, certes sévère mais conforme au texte, conduit au paiement de la taxe de 3% en cas de récidive de déclaration tardive.
Pour rappel
En application des articles 990 D et suivants du code général des impôts, la Taxe de 3% est due, par les entités juridiques françaises ou étrangères, qui détiennent au 1er janvier de l’année d’imposition, de manière directe ou indirecte, des droits réels sur un/des actif(s) immobilier(s) situé(s) en France. Ladite taxe est assise sur la valeur vénale des actifs sous-jacents.
Il existe toutefois de nombreux cas d’exonération, dont celui consistant au dépôt d’une déclaration n° 2746 visant à communiquer à l’administration fiscale les informations relatives à la situation, la consistance et la valeur des immeubles, ainsi que l’identité des actionnaires directs et indirects des biens immobiliers français.
La déclaration doit être déposée au plus tard le 15 mai de chaque année.
S’agissant des entités juridiques qui n’ont pas souscrit leur déclaration n° 2746 dans les délais impartis, l’administration fiscale admet, par tolérance, que ces entités puissent régulariser leur situation, et ainsi être exonérées du paiement de la taxe ; cette mesure de tolérance ne pouvant s’appliquer que lors de la première régularisation.
Un dépôt tardif de la déclaration ? Oui, mais pas deux !
Rappelons les faits à l’origine de l’affaire :
Le 25 août 2005, la société LUPA, société de droit luxembourgeois, a communiqué tardivement à l’administration fiscale, sa déclaration n° 2746 permettant d’établir que la société n’était pas redevable de la Taxe de 3%. Le 6 septembre 2005, l’administration fiscale a adressé à la société une proposition de rectification portant exigibilité du montant total de la Taxe de 3%.
La société ayant précédemment bénéficié, au titre des années 2002 et 2003, de la tolérance de l’administration fiscale permettant de régulariser sa situation lors d’une première infraction[2], la société serait privée de la possibilité de régulariser à nouveau sa situation.
La question est alors de savoir si ce dépôt tardif peut être sanctionnée par le paiement de la Taxe de 3%, alors même que la société a communiqué in fine les informations établissant qu’elle n’est pas redevable de la Taxe de 3%.
La Cour d’appel de Paris[3] avait considéré que la société qui respecte – bien que tardivement – le formalisme déclaratif permettant d’établir la qualité d’entité exonérée de la Taxe de 3% ne peut être sanctionnée par l’exigibilité de la Taxe de 3%, faute d’assiette effective, qu’il s’agisse ou non d’une première infraction.
Dans cette décision, la Cour de Cassation censure l’arrêt de la Cour d’appel de Paris et renvoie l’affaire devant la Cour d’appel. Le débat semble désormais clos : le dépôt tardif de la déclaration de Taxe de 3% entraîne, outre le paiement des majorations et des intérêts de retard, l’exigibilité de la taxe elle-même lorsque la société a précédemment bénéficié de la possibilité de régulariser sa situation.
Les conséquences financières d’un dépôt tardif de déclaration n° 2746 peuvent donc être très importantes (3% de la valeur vénale au 1er janvier des actifs sous-jacents). En cas de cession de sociétés, les garanties à octroyer à un potentiel acquéreur seraient également plus importantes en l’absence de possibilité de régularisation.
Dès lors, compte tenu de l’ampleur des sanctions encourues, il convient de respecter scrupuleusement les délais impartis pour le dépôt de la déclaration n° 2746 afin de s’assurer du bénéfice de l’exonération de Taxe de 3%. En outre, le fait d’être privé du bénéfice de la tolérance administrative en cas de récidive conduit à s’interroger sur l’opportunité même de régulariser de manière spontanée. Autrement dit, après la première régularisation, plus le droit à l’erreur !
Notons par ailleurs que l’obligation de souscrire les déclarations n°2746 par voie électronique s’appliquera à compter de l’année 2021. Les entités juridiques concernées doivent dès à présent anticiper ces nouvelles modalités déclaratives et mettre en œuvre les formalités nécessaires : en effet, les entités étrangères ne disposant pas de compte fiscal en France, devront s’immatriculer et créer un compte professionnel pour pouvoir procéder à leur télédéclaration avant le 15 mai 2021.
De bonnes habitudes déclaratives à (re)prendre dès maintenant pour éviter d’éventuelles sanctions colossales !
[1] Cour de Cassation, 4 novembre 2020, n° 18-11.771
[2] Réponse ministérielle du 13 mars 2000
[3] Cour d’appel de Paris, 6 novembre 2017, n° 15/15981